L’alimentation carnivore et ses intérêts
Actuellement, moins vous mangez de viande, plus vous êtes acclamé. Pour beaucoup, la consommation de viande est responsable du réchauffement climatique et de la montée des maladies cardiovasculaires ou des cancers. Je ne rentrerai pas ici dans ce débat, ce n’est pas mon objectif. Loin des lobbies, je choisis de m’intéresser uniquement aux intérêts des produits animaux pour la santé. Et ils sont indéniables. Généralement, les personnes s’étant mises à la diète carnivore l’ont fait à la suite d’une alimentation cétogène. Ils obtenaient déjà des bénéfices, mais il manquait « quelque chose », un petit paramètre à régler pour être pleinement en forme ou mettre en sourdine leur problème de santé. L’alimentation carnivore possède très souvent ce pouvoir. Rares sont les thérapeutes qui la recommandent mais de nombreux témoignages démontrent ses effets, et ses effets ont été enfin documentés par une étude très récente, dont nous allons parler.
Qu’est-ce que l’alimentation carnivore ?
Concept du carnivore
Le régime carnivore (carnivore diet) est une alimentation exclusivement composée de produits animaux. On a vite tendance à croire qu’il s’agit d’une diète hyperprotéinée à la Dukan mais c'est faux. C’est une alimentation qui est d’abord cétogène, et c’est souvent l’erreur de départ faite par les néophytes. En régime carnivore, on mange gras, du gras animal. On varie le plus possible les sources de protéines animales (viandes, poissons, abats, œufs, fromages…) et matières grasses animales (beurre, suif, graisse de canard…). Vous vous dites sûrement « c’est le cocktail parfait pour une mauvaise santé » mais il y a eu un lavage de cerveau tel sur le cholestérol et la viande rouge, que personne n’admet objectivement les puissants effets de ces nutriments sur notre santé. Donc, le concept est simple : on ne mange que des produits animaux gras et on se fait accompagner au besoin.
Degrés d’application
Il existe divers degrés d’application, comme vous pouvez le voir sur le schéma suivant. En fait, tout dépend du sujet et de ses objectifs. généralement, on effectue une diète carnivore dans l’optique de mettre en rémission une pathologie, très souvent auto-immune, inflammatoire ou digestive. Les personnes vraiment malades auront tout intérêt à basculer vers une version stricte, alors que ceux qui le font à titre récréatif, pour tester et se sentir en forme peuvent se permettre des incartades végétales, bien qu’on s’éloigne du but premier.
Les intérêts du carnivore
- Augmentation drastique de la densité nutritionnelle
- Réduction des sources alimentaires inflammatoires (anti-nutriments)
Pathologies qui peuvent en bénéficier : sclérose en plaques (SEP), thyroïdite d’Hashimoto, maladie de Basedow-Graves, MICI (maladie de Crohn et rectocolite hémorragique, dont certains sont en totale rémission), diabète de type 1, polyarthrite rhumatoïde, endométriose, arthrite juvénile, lupus, dépression, schizophrénie, bipolarité, autisme, TDAH, obésité, ostéoporose, alopécie, syndrome de l’intestin irritable (SII), épilepsie, acné, reflux-gastro-œsophagien (RGO), maladie de Lyme, psoriasis, spondylarthrite ankylosante…
L’étude récente sur la diète carnivore
Très récemment est sortie l'étude « Behavioral characteristics and self-reported health status among 2029 adults consuming a carnivore diet » (Lennerz, Mey, Henn, Ludwig, 2021). Elle était très attendue par les pratiquants, enthousiasmés par leurs résultats personnels. De multiples témoignages sur les réseaux sociaux et blogs devaient se faire entendre. Vous pouvez par exemple lire divers témoignages sur le site de Shawn Baker.
Certes, cette étude n'est pas parfaite. Que peut-on relever de négatif ?
- Les participants à l'étude ont un biais émotionnel (beaucoup réclamaient cette étude)
- David S. Ludwig déclare ses conflits d’intérêts : royalties pour ses livres sur l'alimentation LCHF, programmes éducatifs sur la nutrition, business de consulting
- Belinda S. Lennerz et Owen H. Henn déclarent avoir reçu le soutien du National Institute of diabetes and digestive and kidney diseases
- Jacob T. Mey déclare avoir reçu une bourse de formation du National center for complementary and integrative health
- Cette étude ne prend pas en compte l’hygiène de vie globale, seulement l’alimentation
- Aucune directive des portions, macronutriments et micronutriments, consommation d’abats ou produits laitiers.
Cependant, tous déclarent n’avoir eu aucune implication, seuls les sondés ont fait part de leur expérience.
Les chercheurs ont recruté des personnes majeures suivant un régime carnivore depuis au moins 6 mois (médiane à 14 mois) dans les communautés carnivores (groupes Facebook, Instagram, Reddit etc). La récolte de données s’effectuait à l’aide de questionnaires durant 3 mois. Parmi les troubles chroniques ayant motivé les participants a débuté une alimentation carnivore, il y avait : allergies et intolérances alimentaires, maladies auto-immunes, problèmes de peau, troubles du transit, inflammation. Finalement, ce sont 2029 répondants éligibles qui ont pu participer à l’étude.
Etude carnivore : résultats anthropométriques et biologiques
Nous observons ici des améliorations de la composition corporelle, de l'inflammation (CRP), de la triglycéridémie et des gamma GT. Les transaminases et créatinine sont sensiblement les mêmes. Le HDL a augmenté (facteur favorable de la fonction cardiovasculaire). Le cholestérol total et cholestérol LDL ont augmenté car il y a une plus grande consommation de cholestérol. Cependant, si vous êtes familier avec les derniers travaux sur le cholestérol (ou les bouquins de Michel de Lorgeril), vous savez que ce n’est pas vraiment un soucis, surtout lorsqu’on constate une diminution des triglycérides (véritable facteur de risque cardiovasculaire), du CAC (Score calcique) et hausse du HDL.
Résultats des conditions pathologiques chroniques
La chose la plus frappante dans ces données est le grand succès rencontré pour les personnes atteintes de diabète (à la fois diabète de type 1 et diabète de type 2). Beaucoup sont parvenus à diminuer leurs injections et/ou unités d’insuline (92 %). Également, les anti-diabétiques oraux ont été drastiquement réduits (84 %). Finalement, ces résultats sont logiques : les protéines on un fort pouvoir de contrôle de la glycémie. L’impact sur les reins est favorable. En effet, malgré ce que l’on pense souvent, les néphrons (unité fonctionnelle du rein) adorent carburer aux cétones et le contrôle de la glycémie permet de diminuer l’impact sur les reins 😉
Résultats des changements des marqueurs de santé
Ici, les chiffres parlent d’eux-mêmes… 95 % ont ressenti une amélioration de leur santé générale. 91 % ont observé une diminution de leur faim et fringales (meilleure régulation de la glycémie grâce aux protéines et aux graisse). 69 % ont eu une amélioration du sommeil. Cela me permet de rebondir sur la vieille croyance qui dit que les protéines « excitent » et qu’il faut les éviter le soir, notamment chez les enfants. J’ai moi-même expérimenté un meilleur sommeil en carnivore, et mes consultants me le rapportent également, ne serait-ce qu’en alimentation cétogène classique. C’est simple puisque glycémie stable = bon sommeil 😊
Etude carnivore : les effets secondaires négatifs
Voici les effets secondaires indésirables rapportés (certains étaient déjà présents avant de débuter la diète) :
- Diarrhée 5,5 %
- Constipation 3,1 %
- Prise de poids 2,3 %
- Crampes musculaires 4 %
- Perte de cheveux ou affinement 1,9 %
- Arythmie 1,1 %
- Peau sèche 1,4 %
- Démangeaisons 1,1 %
- Insomnie 1,7 %
- Ongles cassants 1,1 %
- Tout autre effet indésirable < 1 %
Mais ces effets n’ont pas été liés aux différences d'application (prise de compléments alimentaires, inclusion d’abats ou produits laitiers).
Conclusion
Finalement, l’alimentation carnivore n’a rien de nouveau. En effet, elle était utilisée par des médecins avant l’arrivée de l’insulinothérapie dans le cadre du traitement du diabète. Aussi, elle avait également été mise en avant par l’explorateur Vilhjalmur Stefansson. Cet homme avait effectué des expéditions aux côtés de populations arctiques pour qui l’alimentation était exclusivement animale. Stefansson avait décidé de continuer cette façon de s’alimenter tout en étant suivi par une équipe scientifique. Au bout d’une année, il était en parfaite santé. Fait intéressant, il avait tenté de ne consommer que des protéines maigres mais sa santé avait décliné. Cela montre bien qu’il ne s’agit en aucun cas d’une alimentation hyperprotéinée mais cétogène. A l'avenir, d’autres recherches seront les bienvenues afin d'encadrer davantage sa pratique dans la gestion de nombreuses pathologies.
A PROPOS
Estelle Castellanos
Diététicienne-nutritionniste DE
Naturopathe
Fondatrice de la plateforme ATAVI
Santé fonctionnelle
FBCS
Spécialiste des maladies liées aux moisissures
Mycothérapeute certifiée